Ҩ belle of the boulevard. (sierra)

belle of the boulevard
sierra hammer & brenton clifford

Les rayons du soleil faiblissaient mollement, l’astre du jour envoyait ses dernières flèches teintées de rose sur l’immensité bleue ; les vagues se retiraient avec force, puis revenaient avec plus de violence encore. Brent marchait d’un pas assuré, souple, le vent faisant vibrer les boucles brunes autour de son visage. JJ, son chien, ouvrait la voie, près de l’eau, et les traces de ses pas étaient immédiatement avalées par les vagues qui ronronnaient aux oreilles du jeune homme. Il avait quitté le bar un peu plus d’une heure auparavant, promettant à ses employés qu’il repasserait avant la fermeture afin de les aider avec le rangement et les nettoyages. Il en avait alors profité pour faire un saut à la plage, là où il avait pris l’habitude de se réfugier depuis qu’il avait débarqué à Hawaï. Elles étaient très différentes de celles de son enfance ; dans le Maine, l’eau était presque toujours verte, grisâtre lorsque le ciel était peu clément. Ici, elle semblait toujours d’un bleu immaculé. Il en avait fait son lieu de prédilection, celui où il courait tous les matins, celui où il s’abandonnait et laissait s’échapper les mauvais souvenirs.

Tandis qu’il s’abîmait dans la contemplation du soleil qui se couchait doucement, il perçut un aboiement familier, releva la tête et s’aperçut que le chien avait disparu de sa vue. Il avait dû s’éloigner rapidement sur le sable, mais était resté dans les parages puisqu’il entendait ses aboiements. Il accéléra, répéta son nom plusieurs fois en lui demandant de revenir. Puis, soudain, il l’aperçut à quelques mètres, un corps féminin penché au-dessus de lui. Brent la reconnut immédiatement. Il ne sut si c’était dû à son parfum suave et entêtant, à ses cheveux foncés qui ondulaient souplement sur ses épaules, ou encore son rire qu’il entendait de mieux en mieux, tandis qu’il s’approchait d’elle avec un sourire.

« Désolé. » lâcha-t-il quand il s’arrêta finalement à sa hauteur, attrapant son chien par son collier et en lui filant une légère tape sur l’encolure. « Il faut croire qu’il a pris goût à te croiser tous les jours... » expliqua-t-il, un nouveau sourire faisant frémir la bordure de ses lèvres.

S'empêchant de penser aux rouages de son esprit qui s'entrechoquaient, se bloquaient dès qu'il posait les iris sur le visage de la jeune femme, il se concentra sur le pelage beige de JJ qu'il remercia intérieurement d'être là, comme si sa seule présence l'apaisait. Puis, il se redressa lentement. « Comment vas-tu ? »

Une journée à étudier, ce n'était pas très agréable lorsqu'il avait fait si beau. Mais tu étais motivée. Tu avais envie de réussir ce concours qui te permettrait de devenir institutrice en maternelle. Alors, ce n'était pas vraiment une corvée. Puis, tu avais profiter de ce soleil en étudiant à l'extérieur, sur le balcon de l'appartement. Car tu savais que si tu étais allée dans un lieu public, tu n'aurais pas été à fond dans tes documents. Mais maintenant que tu avais bossé, tu avais aussi besoin de décompresser, de sortir de ton appartement. Et tu savais déjà où aller. Le lieu où tu allais quasiment tous les jours depuis quelques semaines. Depuis que tu étais revenue définitivement dans ta ville natale, par ta sœur, celle qui t'avait sans doute fait ouvrir les yeux.
Tu rangeais un peu le logement dans lequel tu cohabitais avec ta sœur et tu décidais de sortir pour te rendre comme convenu dans un lieu que tu appréciais particulièrement, toujours vêtue de ta longue robe. Une fois sortie, tu fermais les yeux et inspirait. Et hop, tu t'avançais pour te glisser entre les grains de sable. Quel bonheur d'être ici, de revenir ici. Et surtout, un beau paysage s'offrait à toi. Dommage que tu n'avais pas pris ton appareil photo, tu te serais amusée. Vint ensuite le moment où tu t'avançais un peu plus vers l'eau pour finalement sursauter lorsque des aboiements se firent près de toi. Un chien. Et tu le reconnus immédiatement. JJ, le chien de Brent. Tu lui parlais, comme si tu parlais à un humain. Les animaux, tu les adorais. Tu le caressais aussi. Comme toujours, tu portais avec toi ton sourire, parce que t'étais heureuse. Tournant la tête, tu ne mis pas longtemps à reconnaître le maitre de ce chien : Brent. Un prénom qui te faisait déjà chavirer mais aucune expression ne le fit montrer. Tu savais rester neutre. « Désolé. » « Ne le sois pas, il est si mignon. Je suis contente de le voir. » Et tu étais aussi contente de voir Brent. Pourtant, tu ne devrais pas. Pas autant. Pas comme ça. « Il faut croire qu’il a pris goût à te croiser tous les jours... » « J'y ais pris goût aussi. » Tu n'avais jamais pu avoir d'animal alors voir JJ chaque jour, ça te plaisait bien. « Comment vas-tu ? » Il te demanda et toi, comme souvent, tu répondais naturellement. « Très bien ! », dis-tu aussi simplement soit-il. De toute façon, ce n'était que vrai. « Et toi ? »

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Il n'était pas très à son aise, n'osait pas soutenir le regard de la jolie brune face à lui, de crainte que certaines de ses pensées se lisent au fond de ses iris. Qu'elle ne devine le pincement au cœur qu'il éprouvait lorsqu'il la croisait au bord de la piscine de la résidence ou dans les couloirs. Ou, encore, quand elle passait les portes du Mai Tai et s'installait au bar, en lui souriant. D'ailleurs, souvent, elle était accompagnée de sa sœur, et il se félicita intérieurement que ce ne fût pas le cas en cet instant précis. Il était épuisé de feindre une complète indifférence ; son ex-femme était désormais sa meilleure amie, elle ne le connaissait que trop bien et il craignait qu'elle ne décèle une bizarrerie dans son comportement. Pourtant, véritable paradoxe au cœur de cette situation déjà si compliquée, il se sentait bien aux côtés de Sierra ; l'humeur légère, l'esprit vidé des ennuis quotidiens, un nouveau sourire franchissant ses lèvres à chaque seconde. Il était bien, et c'était exactement ce qui l'ennuyait. S'il n'avait pas un tableau de chasse aussi impressionnant que celui de son ami d'enfance, il avait eu assez de relations pour savoir ce que l'on ressentait pendant la première phase, celle on l'on apprenait à connaître l'autre, à faire rire, à s'ouvrir peu à peu. Évidemment, la situation était différente dans ce cas précis et, néanmoins, il ne pouvait s'empêcher de comparer. Comme s'il s'attendait à ce que cette relation évolue... Ce qui était impossible. Totalement impossible.

A sa question, elle répondit avec un sourire, une voix posée et enjouée, qui résonna comme une douce mélodie aux oreilles de Brenton. « Très bien ! » Il acquiesça, reporta son attention sur l'animal de compagnie qui s'éloignait d'un pas lent. Tandis qu'elle lui retournait la question, il claqua doucement des doigts en s'assurant que le chien revienne près d'eux. « Très bien, moi aussi. »

Il jeta un rapide coup d'œil à la montre à son poignet, s'assurant qu'il lui restait bien plusieurs heures avant de rejoindre ses employés au Mai Tai. Puis, reportant son attention sur Sierra : « Tu marches un peu avec nous ? » il proposa en indiquant la plage qui semblait s'étendre à l'infini devant eux. « C'est qu'il n'a pas beaucoup de conversation... Ça me changera, quelqu'un qui répond à mes questions. » plaisanta-t-il en faisant référence à JJ.

Tandis qu'il se remettait en marche, après qu'elle eût répondu à sa requête, il se demanda brièvement comment elle se sentait, s'il lui était aisé d'être de retour dans son île natale ou si elle éprouvait quelques difficultés d'adaptation. Elle devait avoir l'habitude. Jace lui avait beaucoup parlé de cette sœur, journaliste qui sillonnait le monde afin d'en débusquer les secrets enfouis et d'en faire des articles brillant de talent et de passion. Elle devait donc être acclimatée aux changements de culture, de climat et de rythme de vie. Lui-même n'y connaissait rien. Depuis qu'il était arrivé à l'âge de huit ans sur l'île, il ne l'avait jamais quittée. Et, si, à l'adolescence, il avait éprouvé le besoin de connaître le Maine, plus particulièrement le village où il était venu au monde, cette lubie lui était passée. La vie qu'il menait à Hawaï lui semblait suffisamment prenante, passionnante. Et il ne souhaitait pas vivre dans les regrets, s'enfermer dans les souvenirs. Tout ce qu'il voulait, c'étaient que les jours se suivent et me se ressemblent pas.

Pourtant, au fond de lui, la curiosité le tiraillait. « Alors, comment vis-tu ce retour en terre natale ? »

Tu t'étais redressée, faisant ainsi face à Brenton qui te répondit par la suite. « Très bien, moi aussi. » Tu l'avais écouté, regardé puis tu avais tourné légèrement le visage vers l'horizon de l'océan. Un peu de vent te caressait le visage, jouant avec tes cheveux bruns tel un ventilateur. « Tu marches un peu avec nous ? » « Oui, bien sûr. J'en serai heureuse. » Puis, après tout, tu n'avais plus rien à faire. Ta venue ici, à la plage, était pour marcher sur le sable, près de l'eau, à l'écoute des vagues. Et c'est ce que tu allais faire, avec Brenton et JJ, son chien. De plus, ta sœur cadette ne t'attendrait pas puisqu'elle t'avait dit qu'elle rentrerait tard. Autant ne pas rester seule. Tu allais simplement marcher avec un homme devenu un ami après tout. « C'est qu'il n'a pas beaucoup de conversation... Ça me changera, quelqu'un qui répond à mes questions. » Tu souriais, comme amusée. De plus, il avait totalement raison. Un chien ne parlait pas. Il ne répondait pas aux questions mais il pouvait écouter, comprendre et réconforter, non ? « Ah, tu as des questions alors ? » Et ta réponse ne tarda pas à arriver puisqu'il lui en posa une. Après tout, tu en avais toi aussi pour lui mais les tiennes étaient bien plus personnelles sans doute. Autant dire que tu n'oserais jamais les poser. « Alors, comment vis-tu ce retour en terre natale ? », te demanda-t-il.
Et face à cette question qu'il venait de te poser, tu repensais. A tes allers-retours. Tu n'avais fait que ça. Bien trop souvent. Partir dans un autre pays et revenir ici. Tu savais d'ailleurs que tu n'avais pas été une bonne sœur lors de ces moments, que tu n'avais pas agi en tant que telle. Mais tu t'en étais rendue compte. Heureusement d'ailleurs. Était-ce trop tard ? Ce n'était pas à toi de t'en juger. Mais tu t'en mordais les doigts. Et puis, c'est vrai que tu en étais lassée. Toi aussi, tu avais besoin de ta famille. Tu ne les avais vu que trop peu. T'avais besoin de stabilité. Tu ne voulais pas avoir de regrets par la suite. Ce fut tout de même une belle expérience. Tes voyages en tant que journaliste, tu ne les regrettais pas. Certainement pas. Tu aurais juste peut-être dû moins bouger. Juste un peu moins.
Te voilà revenue à la réalité, sortie de tes pensées qui n'avaient duré guère longtemps. « Bien. J'en suis ravie. Ma sœur en avait besoin, et j'en avais besoin aussi. Je pense avoir pris la bonne décision. Je l'espère en tout cas. » Le journalisme t'avait plutôt bien réussi. T'espérais qu'il en serait de même pour la suite, lorsque t'allais passer le concours, qui n'était d'ailleurs pas pour tout de suite. Que ferais-tu sinon ? Tu continuerais le journalisme sinon. Mais t'en avais réellement marre. Travailler avec les enfants, c'est ce que tu voulais.
Vous marchiez côté à côté avec néanmoins JJ, entre vous, comme une séparation. Ce n'était pas plus mal. Tu levais la tête vers Brenton. Qu'est-ce qu'il était beau. C'est pourquoi tu détournais le regard, tout en souriant, presque troublée. A ton tour. Tu décidais aussi de lui poser une question. « Et toi, tu n'as jamais voulu voyager ? Découvrir d'autres paysages, d'autres cultures ? » Simple curiosité aussi. Et puis, tu savais bien qu'il n'avait pas voyager puisque ta sœur te l'avait dit. Après tout, elle te parlait beaucoup.

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Les voyages, les longues heures d’attente aux aéroports où l’on faisait escale, il n’avait pas la moindre idée de ce que cela signifiait. Pendant quelques instants, il médita sur la question. Est-ce que cet inconnu laissait un vide au fond de son âme ? Ressentait-il une certaine curiosité face à cette vie de nomade ? Il ne put le dire avec précision. Certes, d’après ses traits de caractère, il paraissait évident que Brenton aurait été attiré par la nouveauté, une existence qui repartait de zéro dans un endroit qu’il ne connaissait pas et dont il avait tous les secrets à découvrir. Pourtant, il n’avait jamais pensé à quitter son île. Il ne sut se l’expliquer. Peut-être cela était-il lié à son enfance, au fait qu’il avait dû quitter son état natal avec une urgence infinie ; tout ce que Sierra avait connu dernièrement, dans son métier de journaliste, lui y avait été plongé contre son gré, malgré lui, à l’âge de huit ans. Il avait dû quitter tout ce qu’il connaissait, avait dû se frayer une place au sein d’une famille qui n’était, alors, pas encore la sienne. Il s’était refait des amis, une place dans la société. A présent qu’il possédait tout cela, que tout cela était entre ses mains, peut-être s’interdisait-il de s’en éloigner. Pour sa sécurité mentale. « Bien. J'en suis ravie. Ma sœur en avait besoin, et j'en avais besoin aussi. Je pense avoir pris la bonne décision. Je l'espère en tout cas. » répondit son interlocutrice soudainement, en le ramenant à la réalité. Il vrilla sur elle ses iris inquisiteurs, curieux. Pour toute réponse, il acquiesça.

Elle avait évoqué sa sœur, son ex-femme, et cette simple pensée forma une boule dans les tréfonds de sa gorge. Pourtant, il n’avait de cesse de se rappeler qu’il ne faisait rien de mal. Ils marchaient l’un à côté de l’autre. Cela n’impliquait rien d’autre. Absolument rien. Evidemment, les regards qu’il jetait sur elle était à double tranchant, mais il s’interdit d’y penser. A nouveau, elle reprit la parole : « Et toi, tu n'as jamais voulu voyager ? Découvrir d'autres paysages, d'autres cultures ? » Il s’était demandé quand la question viendrait à lui. Il se contenta de taire ses pensées les plus secrètes, haussa simplement les épaules. « Pas vraiment. J’ai tout ce que je veux, ici. Mes amis, ma famille, mon bar… » argua-t-il, avec un sourire tendre à l’évocation de tout ce qu’il possédait ici. Il releva la tête, perdit ses yeux dans le mouvement répétitif des vagues.

Puis, il se redressa et lui offrit un nouveau sourire. « Tu aimes vraiment ta sœur, hein ? » fit-il, soudain, sans plus de détours. S’apercevant de la brusquerie, il se mordit les lèvres, plissa le nez, puis hocha la tête en se reprenant. « Je veux dire que vous êtes très proches… » D’ailleurs, la cadette n’avait pas tari d’éloge concernant sa sœur lorsqu’ils étaient encore mariés. Elle lui avait promis qu’il l’apprécierait. Savait-elle seulement à quel point elle avait raison ?

« Pas vraiment. J’ai tout ce que je veux, ici. Mes amis, ma famille, mon bar… » Les amis, et la famille. Ce pour quoi tu étais principalement revenue pour de bon. Pour toi aussi, certes. Mais pour ta famille surtout. Lui, il était heureux. Toi aussi, tu aurais pu t'arrêter là. T'en contenter. Mais tu avais voulu avoir plus. L'aventure, ça te plaisait terriblement. T'avais été intriguée. Et t'avais succombé. Est-ce que cela voulait dire que tu étais une personne égoïste ? En tout cas, ça n'avait jamais été ton attention. Après tout, tu savais qu'être entourée de tes proches te rendrait heureuse. Mais peut-être avais-tu ressenti un vide et c'est pourquoi tu avais décidé de faire des articles sur le monde et non pas sur ta simple ville, qui pourtant subissait beaucoup d'évènements ces derniers temps. « Je te comprends. Vraiment. »
« Tu aimes vraiment ta sœur, hein ? » Quelle question. En fait, ça te faisait penser à un sous-entendu. Que toi seule avais pu imaginer sans doute. C'est comme si cette question était là pour savoir si t'étais prête à faire un acte qui nuirait à ta sœur. Tu savais bien qu'il n'aurait jamais pensé à une telle question. Et puis, tu ne savais même pas du tout si tu plaisais à Brenton. Tu étais certaine que tu n'étais qu'une amie pour lui. Et c'était bien le cas. Seulement...tu te demandais tout de même s'il n'avait pas un ressenti en plus. Comme c'était le cas pour toi. Cette question, jamais tu ne lui demanderais. Tu devais arrêter de penser à ça. Après tout, ce n'était dû qu'à ces grands changements que tu avais décidé d'adopter. Tu le pensais fortement en tout cas. « Je veux dire que vous êtes très proches… » « Oui, c'est vrai... Surtout depuis que je suis revenue. » Il est vrai que lors de tes allers-retours, vous ne vous voyez qu'en coup de vent. Et vous ne vous parliez pu comme vous l'aviez fait dorénavant ou comme vous pourriez le faire désormais. Ça t'avait d'ailleurs terriblement manqué. Et à ta sœur aussi, à ce qu'elle t'en avait dit. « Je me suis rendue compte de l'avoir abandonnée pendant un moment. Et je m'en veux. Je n'étais même pas là quand vous vous êtes mariés... » Ton plus grand regret sans doute. Peut-être aurais-tu dû à ce moment-là, passer outre les règles de ta supérieure. Peut-être n'avais-tu pas assez insister pour lui dire qu'une autre personne que toi aurais dû faire l'article sur lequel tu étais. Qu'est-ce que tu t'en voulais. Et tous les jours. « Je suis sa grande sœur. Je suis celle qui doit veiller sur elle. Et je ne l'ai pas bien fait, je le sais bien. » Ouais, tu te pensais être une mauvaise sœur. Et sans doute l'étais-tu.
Mais là-bas, à l'étranger, tu avais aussi vécu une aventure humaine. Tu avais fait de belles rencontres. Certaines avec qui tu gardais contact. Certaines que tu ne reverrais sans doute jamais. Des personnes terriblement généreuses qui vivaient dans le besoin, et qui pourtant, se considéraient heureux. Qui n'avait pas grand chose à manger et à boire. Jamais tu ne pourrais regretter ça. Tu avais oublié les mauvais souvenirs de tes voyages pour ne garder que les bons.

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C’était une question purement rhétorique, afin d’alimenter la conversation. En fait, parler de son ex-femme l’empêchait de lancer des regards un peu trop insistants en direction de Sierra, de s’attarder sur la courbe de son épaule ou sur coin de peau dénudé et pâle. Il fallait absolument qu’il trouve un moyen de se reprendre. Et celui-ci fut le seul qu’il avait sous la main. « Je me suis rendue compte de l'avoir abandonnée pendant un moment. Et je m'en veux. Je n'étais même pas là quand vous vous êtes mariés... » Le jeune homme lui jeta un furtif coup d’œil, s’apercevant que le sujet l’attristait plus que de raison. S’en vouloir pour avoir manqué leur mariage ? C’était bien la dernière chose qu’elle devrait faire. Après tout, d’un commun accord, les deux époux avaient décidé que ce mariage était une grande farce, une belle mascarade. Une erreur de jeunesse, tout simplement. Ils cherchaient quelque chose qui comblerait un manque, avaient pensé qu’ils l’avaient trouvé dans l’autre ; et ils s’étaient tout simplement trompé.

Alors, il releva les yeux sur elle, la fixa longuement, étudiant ses traits fins. « Oh, tu sais, tu n’as manqué que quelques semaines de grand n’importe quoi » expliqua-t-il, en résumant l’idée de son mariage. Un véritable fiasco. Puis, s’apercevant que cela pouvait être mal interprété, il se reprit. « Ne te méprends pas. Ta sœur est une personne géniale. Je l’adore… » Je l’aime, aurait-il pu même dire, à ce stade. Mais l’amour, c’était un peu trop surévalué à son goût. « Seulement, pas comme un mari devrait adorer sa femme. » Désormais, son ex-femme était son amie la plus proche. Celle qu’il considérait comme quelqu’un de sa famille, à part entière. Ils s’entendaient mieux encore que pendant les quelques semaines où ils avaient été époux et épouse. C’était peut-être difficile à croire mais, autour d’eux, tout le monde le leur disait. Cependant, l’inquiétude et le remord se devinaient toujours derrière ses pupilles claires. Décidemment, Sierra s’en voulait énormément. Et il admettait qu’il ne comprenait pas très bien pourquoi. Après tout, sa cadette était adulte, non ? Elle prenait ses propres décisions. Aussi folles furent-elles. « Je suis sa grande sœur. Je suis celle qui doit veiller sur elle. Et je ne l'ai pas bien fait, je le sais bien. » lâcha-t-elle, finalement.

Cette dernière confession lui arracha un soupir. Doucement, il s’immobilisa sur le sable, effleura le coude de la jolie jeune femme, la priant de faire de même. Face à elle, il baissa les yeux, qui s’accrochèrent aux iris clairs, butèrent sur la moue rosie, remontèrent le long de l’arête du nez et s’immobilisèrent enfin au niveau des yeux. « Il ne lui est rien arrivé de grave. Tu ne devrais pas t’en vouloir. Elle vit sa vie, elle fait ses expériences. Et tu as le droit de faire les tiennes. » déclara-t-il d’un ton assuré.

T'avais baissé le visage, ton regard aussi après avoir fini de parler. T'avais simplement poser tes yeux sur le chien. Tu te demandais vraiment comment l'animal fonctionnait. Tu n'étais pas comportementaliste ou dans un autre métier animalier mais tu pouvais te douter qu'ils ressentaient les mêmes sentiments qu'un humain pouvait ressentir. La joie autant que la jalousie, la tristesse, la colère ou même le désir. « Oh, tu sais, tu n’as manqué que quelques semaines de grand n’importe quoi » Tu souriais. Tu avais même laissé échapper un son sortir. Un rire. Parce qu'en fait, c'était drôle. Le mariage de ta sœur avait donc été du grand n'importe quoi. Tu le savais bien. Ta sœur t'en avait dit la même chose. Elle t'en avait fait le même résumé. Et valait mieux en rire qu'en pleurer. En plus, il n'y avait sans doute rien de triste dans ce mariage. Plus maintenant en tout cas. « Ne te méprends pas. Ta sœur est une personne géniale. Je l’adore… » Oh ça oui, tu savais parfaitement qu'elle avait toujours été superbe personne. Beaucoup le savaient très bien. Brent, celui qui avait partagé un bout de la vie de ta petite sœur, le savait lui aussi. « Seulement, pas comme un mari devrait adorer sa femme. » Depuis le divorce, en ce qui concernait ta sœur, elle se trouvait être bien plus heureuse. Ou peut-être cachait-elle bien son jeu. Mais elle est tout de même ta sœur et tu la connais assez bien pour savoir qu'elle l'est plus qu'elle ne l'était pendant le mariage. D'ailleurs, ça t'effrayait quelque peu que tu connaisses aussi bien ta cadette puisque tu te doutais bien qu'il en était de même d'elle, pour toi. « Beaucoup de divorces se passent mal. C'est superbe que ça n'ait pas été le cas pour le vôtre. » Divorcer devait quand même être un événement dur. En fait, t'en savais vraiment rien. Tu ne pouvais absolument rien dire à ce sujet puisque tu n'en avais jamais vécu. Tu n'avais même jamais été mariée. Et ça n'arriverait pas de sitôt.
Brent s'arrêtait. JJ, le seul qui ne parlait évidemment pas depuis le début, en faisait de même. Il écoutait sans doute. Puis, ce fut à ton tour de te stopper sur cette courte marche, après que l'ex-mari de ta fameuse sœur t'ait fait provoquer quelques frissons. Tu le regardais, nageant complètement dans son regard et te mettant alors à l'écouter parler de celle qui avait le plus de valeur à tes yeux. « Il ne lui est rien arrivé de grave. Tu ne devrais pas t’en vouloir. Elle vit sa vie, elle fait ses expériences. Et tu as le droit de faire les tiennes. » C'est d'ailleurs ce que t'avais essayé de te convaincre. Tu soupirais un coup, puis tu répondit simplement, le sourire habituel te revenant aux lèvres. « T'as sans doute raison. »